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L’Argentine ne sera pas le troisième pays latino-américain à autoriser l’avortement, après Cuba et l’Uruguay. Cette nuit, le Sénat a rejeté, par 38 voix contre 31 et deux abstentions un projet de loi légalisant l’IVG voté par la Chambre des députés. Même si un petit groupe de personnes s’est affronté avec la police après le vote, c’est dans le calme que les partisans du droit à l’avortement ont attendu la décision des sénateurs.
D’une certaine façon, ce «non» n’est pas une surprise puisque depuis plusieurs jours, la presse argentine comptabilisait les pour et les contres et le chiffre de 37 ou 38 sénateurs votant contre la légalisation circulait. Sous la pression, certains auraient pu changer d’avis. C’est ce qui s’était produit en juin dernier, lors du vote par les députés. Le texte visant à légaliser l’IVG avait été adopté à une courte majorité de 4 voix après de longues heures de débat à la Chambre.
Avec ce rejet, le Sénat ferme la porte pour les deux prochaines années à une éventuelle légalisation de l’IVG puisqu’il faudra attendre la mise en place d’une nouvelle législature pour remettre à l’ordre du jour cette question.
Pas de retour en arrière possible
Si le vote a été accueilli par des feux d’artifice et des cris de joie parmi les militants anti-IVG rassemblés devant le Parlement, dans la rue, le droit à l’avortement a gagné, rapporte notre correspondant à Buenos Aires, Jean-Louis Buchet. Malgré la pluie et le froid, une véritable marée humaine a envahi le centre de la capitale argentine et ceinturé le Parlement en attendant le vote des sénateurs, intervenu après 14 heures de débats.
Des dizaines de milliers de personnes, des femmes en majorité, pour la plupart très jeunes, mais aussi beaucoup d’hommes, tous arborant le foulard vert de la Campagne pour l’avortement libre, sûr et gratuit, ont chanté et dansé durant la nuit dans une ambiance de fête. Le vote passé, la déception était perceptible et la colère palpable, certaines personnes en sont mêmes venues aux mains avec les forces de l’ordre, ce qui a occasionné quelques arrestations.
Mais presque tous sont convaincus qu’il n’y aura pas de retour en arrière. L’hypocrisie de la situation actuelle, où l’avortement est clandestin et souvent dangereux pour les femmes les plus pauvres mais sans danger pour celles qui peuvent payer des cliniques privées, a été révélée grâce au débat qui, au-delà du Parlement, a gagné toute la société au cours des derniers mois.
Et si, dans une décision où aura beaucoup pesé la pression de l’église catholique, les sénateurs se sont finalement inclinés pour le rejet, ce sera peut-être la dernière victoire du pape François dans son pays d’origine.
Le gouvernement amorce un geste
Selon la presse nationale, le président Mauricio Macri envisagerait d’inclure dans la grande réforme du code pénal qui est en cours de préparation une dépénalisation de l’avortement. Une réforme qui sera également soumise aux votes des deux chambres. En clair cela signifie qu’une femme qui avorterait ne serait plus condamnable. A l’heure actuelle la justice argentine peut condamner une femme qui avorte à une peine de prison pouvant aller de un an à quatre ans. Par contre, même si elles ne pourront plus être condamnées, ces femmes ne bénéficieront pas d’aides publiques. Des aides qui resteraient seulement possible en cas de viol ou de risque pour la santé de la mère.