ASUDEC : 20 ans au service du développement rural

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Au Burkina Faso, plusieurs structures sont à pieds d’œuvre pour lutter contre la pauvreté. Parmi elles, l’ONG ASUDEC qui depuis 20 ans fait du développement communautaire sa priorité. Somé Salibo le directeur général de ladite structure partage avec nous ses expériences.

FP: Présentez- vous à nos lecteurs.

SS: Je suis Somé Salibo directeur général exécutif de l’ONG ASUDEC et PCA de la mutuelle d’épargne et de crédit de l’ONG ASUDEC (MECRA). ASUDEC a été créée en 1998 et a commencé ses activités sur le terrain en 1999. Ce qui nous fait 20 ans d’expérience dans le développement communautaire. Nous sommes présents dans six régions à ce jour. En 1999 nous avons démarré les activités dans un petit village dans le Sud-Ouest (Bapla). Par la suite, nous avons progressivement évolué jusqu’à couvrir près de 216 villages dans ces six régions dont la région du Sud-Ouest, du Centre, du Centre Sud, du plateau central, de la boucle du Mouhoun et du Centre Ouest.

FP: quel objectif ASUDEC poursuit-elle?

SS: l’objectif global vise le mieux-être de l’humanité, à commencer par l’Afrique sub-saharienne. C’est une vision tellement vaste et idéaliste. Mais l’objectif fondamental est le développement durable des communautés les plus défavorisées, notamment les populations en périphérie des villes. Au Burkina Faso nous nous adressons principalement aux populations rurales.

FP: quels sont vos domaines d’interventions ?

SS: nous intervenons dans l’élevage, l’agriculture, la micro finance d’où la mise en place de la MECRA. Nous intervenons aussi dans l’alphabétisation surtout dans l’alphabétisation fonctionnelle, également dans le reboisement. Depuis 1999, nous avons planté des centaines de milliers d’arbres. Aussi puisqu’on ne peut pas parler de développement sans entreprenariat, nous mettons beaucoup plus l’accent sur l’entreprenariat des femmes et des jeunes.

FP: combien de membres compte ASUDEC à ce jour?

SS: Les méthodes d’évaluation des bénéficiaires dépendent des partenaires financiers ; mais en évitant les cumules des statistiques, nous pouvons dire que ASUDEC a plus de 40 000 membres. Cela fait plus de 40 000 ménages que nous soutenons dans nos différentes activités.


FP: 20 ans d’expérience quel bilan ASUDEC peut-elle faire?

SS: ASUDEC peut se vanter d’avoir commencé tout petit en application de notre principe fondamentale qui est la stratégie du caméléon. Cette stratégie veut qu’on commence tout petit pour grandir prudemment selon la volonté des bénéficiaires d’aller de l’avant et aussi en fonction des ressources financières et humaines que nous allons acquérir. On est très fière d’avoir commencé par un seul volontaire pour arriver là où nous sommes aujourd’hui. Et la vision c’est d’aller au-delà de nos frontières. ASUDEC ne veut pas seulement être burkinabè parce que nous avons dit African Sustainable Development Council ou Conseil de Développement pour l’Afrique. C’est une vision très vaste donc c’est d’aller dans d’autres pays au fur et à mesure que les forces seront acquises.

FP: après 20 ans ,quelles ont été les plus grandes difficultés que vous aviez eu à surmonter?

SS: premièrement la plus grande difficulté c’est l’incompréhension des populations. Dans un pays comme le Burkina Faso voir de l’Afrique subsaharienne les termes « ONG » et « projet » sont prostituées. Pour les uns et les autres même les intellectuelles, un projet est une boite à sous que l’on gère en s’enrichissant impunément. Le terme ONG est aussi prostitué parce que pour bon nombre de personnes une ONG est mise en place par de petits malins pour prendre avantage de la pauvreté des populations ou de certaines situations désolantes pour s’enrichir sans s’inquiéter. Alors quand vous êtes dans une communauté comme celle-ci, il est très difficile de progresser. Quel que soit votre bonne foi, vous ne pouvez pas changer la compréhension des gens. Pire encore, l’esprit de subsistance et l’habitude de l’assistanat expliquent que beaucoup ne sont pas persistants et n’hésitent pas à abandonner les activités des projets dès que les moindres difficultés se présentent pour continuer leurs vies habituelles. Chaque organisation ayant ses valeurs, les nôtres auront beaucoup aidé à tenir le cap jusqu’aujourd’hui. Une autre difficulté c’est la vision-même de certains bailleurs. Beaucoup de bailleurs ne recherchent que des statistiques pour une auto satisfaction ; en d’autres termes, la majorité des bailleurs privilégient les secours d’urgence. La vision d’ASUDEC étant le développement durable, vous comprenez que nous soyons parfois frustrés. Vous avez d’un côté les bénéficiaires qui veulent vite satisfaire leurs besoins de survie et qui abandonnent les activités du projet dès les premières difficultés et de l’autre côté vous avez certains bailleurs qui recherchent des statistiques comme si le développement était une équation mathématique. Dans ce contexte, il faut être assez dur pour imposer sa ligne directrice et tenir le cap. Il faut avouer que nous avons eu la chance de rencontrer des partenaires qui partagent nos valeurs et qui nous ont beaucoup soutenu jusqu’à ce jour. Nous ne pouvons qu’être fiers du chemin parcouru et des résultats.


FP: quels perspectives ASUDEC compte t’elle mettre en place pour aller de l’avant?

SS: Avec l’avènement du terrorisme, nous avons perdu nos principaux bailleurs et sommes présentement en manque de ressources. Notre objectif à cours termes est donc de remonter la pente. Nous avons un conseil d’administration dynamique qui nous encourage beaucoup et qui a proposé d’excellentes voies de sortie de crise. Pour le moyen terme, avec nos 20 ans d’expérience, nous pensons qu’il est temps de réaliser notre objectif primordial qui est de promouvoir et de mobiliser l’intelligentsia africaine pour le développement à la base. Nous y œuvrons déjà et devront continuer. Nos objectifs pour le long terme dépendront de la situation sécuritaire aux niveaux national et régional dont la mobilisation des ressources est tributaire.

Propos recueillis par Mireille Bailly

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