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L’intelligence artificielle est de plus en plus utilisée par la presse pour automatiser des tâches rédactionnelles, mais elle trouve encore assez vite ses limites, selon des spécialistes.
Le quotidien 20 Minutes a ainsi présenté au salon Big Data, organisé cette semaine à Paris, ses efforts pour construire un « assistant du journaliste », qui ferait à sa place des tâches automatisables pour lui laisser la partie la plus humaine, l’analyse et l’art du récit.
Le projet visait à proposer automatiquement au journaliste des « tags », des mots clefs permettant de faire le lien avec d’autres informations, ainsi qu’un titre et un résumé de l’article.
« La partie +tags+ a donné les résultats les plus performants », a expliqué Bouzid Ait Amir, du cabinet Keyrus qui a mis au point les outils informatiques utilisés par 20 Minutes. Mais les résumés et les titres « nous ont donné le plus de fil à retordre » car « les techniques ne sont pas encore matures », a-t-il reconnu.
Ainsi pour un fait divers titré par un vrai journaliste « Disneyland Paris: un homme armé arrêté dans un hôtel du parc, sa compagne recherchée », la machine n’a pu trouver mieux que « Seine-et-Marne: un homme blessé par balle dans un accident ».
Le système propose souvent « soit des titres bateau, soit une accumulation de mots (…) qui globalement n’ont aucun sens », explique Bouzid Ait Amir.
20 Minutes va donc se limiter pour l’instant à une intelligence artificielle proposant tags et recommandations d’articles.
Mais la capacité des systèmes informatiques à élaborer des textes informatifs simples ne cesse de progresser, comme le montre l’exemple de la société nantaise Syllabs, un pionnier international en la matière.
Syllabs – qui a travaillé avec de nombreux médias français, dont l’AFP – vient de lever deux millions d’euros pour asseoir son expansion.
Ses robots rédacteurs sont capables de produire automatiquement des textes simples sur des informations basées surtout sur de la donnée chiffrée ou très structurée: des résultats d’élections ou de compétitions sportives, des évolutions de marchés financiers…
En 2015, ils ont été capables par exemple de générer automatiquement pour Le Monde de courts textes de présentation des résultats des élections départementales dans plus de 30.000 communes et 2.000 cantons.
– Info ultra-locale –
« Le fait d’utiliser des robots rédacteurs permet de se rapprocher de ses lecteurs et d’atteindre des lecteurs qu’on ne pouvait pas atteindre avant », par exemple en proposant une info ultra-locale, a expliqué à l’AFP Claude de Loupy, co-fondateur et directeur général de Syllabs.
Des matches de foot locaux par exemple: les informations existent, « mais elles ne sont pas accessibles sous une forme lisible pour quelqu’un qui se trouve à l’autre bout de la France ou au bout du monde et dont le cousin ou le neveu se trouve sur la pelouse », explique Claude de Loupy.
L’intérêt des robots rédacteurs dans ce cas est de « transformer quelque chose qui est incompréhensible ou difficilement atteignable en un texte ou un graphique, quelque chose qui s’appréhende immédiatement », explique-t-il.
Mais si les robots rédacteurs peuvent produire des textes courts à partir de données bien ciblées, ils sont incapables de produire une analyse, de faire des liens pertinents entre des faits, note M. de Loupy.
« On peut produire automatiquement des textes sur les tops et les flops du jour à la Bourse », explique-t-il par exemple. « Mais il n’y a que le journaliste qui soit capable (…) de faire le lien » entre tel ou tel flop « et la déclaration du PDG ce jour-là ».
« On ne peut pas laisser une intelligence artificielle décider s’il y a un lien de cause à effet, c’est beaucoup trop complexe », ajoute-t-il.
Syllabs prévoit de doubler ses effectifs en 2018 pour atteindre la quarantaine de salariés et Claude de Loupy prévoit « une croissance à trois chiffres dans les cinq prochaines années ».
Les robots rédacteurs de Syllabs suscitent de l’intérêt « dans toute l’Europe, voire à l’extérieur de l’Europe », assure-t-il en effet.
https://www.afp.com/fr/infos/2260/lintelligence-artificielle-futur-turbo-des-redactions-doc-12f5ev2