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Un sphinx au regard tourné vers la mer… Voilà à quoi ressemble la maison d’Ousmane Sow. Celle qu’il construisit, sans architecte ni plans, en 1991, dans le quartier de Yoff Virage. À partir d’une simple maquette, conçue comme une véritable œuvre d’art, il s’attela à l’édification de sa demeure, dont le nom emprunte à la mythologie égyptienne. Il habita ensuite cette maison de trois étages jusqu’à son décès, le 1er décembre 2016.
Les dernières années de sa vie, il avait émis le souhait de voir son œuvre retrouver le Sénégal, son pays natal, au sein d’un musée situé à la Cité Elizabeth-Diouf, à Hanne Mariste. Le temps lui a manqué pour concrétiser ce projet d’envergure. Mais ses deux enfants, Ndeye et David Sow, ainsi que sa compagne, Béatrice Soulé, ont respecté sa volonté, quitte à faire l’impasse sur le lieu. Aussi, le musée dont rêvait Sow est désormais abrité sous le toit où il vivait, si bien que l’idée même de musée n’est pas vraiment adaptée.
Il a vécu, sculpté et nous a quittés dans cette maison qui, ainsi habitée par ses œuvres, ressuscite », raconte sa fille
« Nous tenons au terme de “maison”, explique sa fille, Ndeye Sow. Nous avions un père anticonformiste, qui ne s’encombrait pas de la lourdeur des choses. Son œuvre est d’ailleurs très peu présente dans les musées traditionnels. » Et d’ajouter que la bâtisse est habitée de tout ce qu’il y a réalisé, que les sculptures y sont naturellement chez elles.
« Il a vécu, sculpté et nous a quittés dans cette maison qui, ainsi habitée par ses œuvres, ressuscite. » Reste à déterminer quels tarifs seront proposés aux visiteurs… Sous un soleil peu clément, la maison, résolument contemporaine avec son architecture géométrique, s’élève toute en couleurs : vert bouteille, jaune ocre, latérite rouge, tons d’orange et de bleu indigo. « Tous les murs ont été repeints, en avril dernier, avec la matière des sculptures d’Ousmane, et cela grâce à son assistant, qui en connaît la composition », indique Béatrice Soulé.
« Le produit », sa matière secrète
Cette dernière accompagne la première visite de la maison en présence de Gérard Senac, PDG d’Eiffage au Sénégal et ami d’Ousmane Sow. L’une des pièces porte d’ailleurs son nom. Les autres sont dédiées à Moctar Sow, père de l’artiste, aux sculpteurs Moustapha Dimé et Ndary Lo, au kinésithérapeute Boris Dolto, au peintre Souleymane Keita ou à l’architecte Iba Mbaye.
Dans ces salles bordées de vérandas où les lutteurs noubas côtoient les guerriers masaïs, où les Zoulous voisinent avec les Peuls, où Mandela n’est pas très loin de De Gaulle, on ne peut s’empêcher d’être fasciné par le sol. Chacune des dalles de couleur a été réalisée à partir de cette fameuse matière qu’Ousmane Sow appelait « le produit ». « Il a installé les carreaux alors qu’il achevait la maison, en 1999, tout en travaillant sur les trente-cinq pièces de La Bataille de Little Big Horn », se souvient Béatrice Soulé.