D’un pas assuré, le président de la République rwandais, Paul Kagamé, avance dans les couloirs du siège de l’Union africaine (UA), à Addis-Abeba. En cette matinée de dimanche 28 janvier, les chefs d’Etat africains s’enferment dans une salle pour une longue réunion à huis clos. A la tribune de la salle plénière, éclaboussée de soleil peu avant 15 heures, le président sortant de l’UA, le Guinéen Alpha Condé, salue son successeur, M. Kagamé, à qui est « confié le processus de la réforme institutionnelle de [l’]Union ».
L’ancien chef rebelle qui, dans les collines et sur les hauts plateaux du Rwanda, se disait dépourvu d’ambition politique, a fini par ne plus lâcher ce pouvoir conquis par les armes. Avec froideur, discipline et, parfois, brutalité, le chef d’Etat de 60 ans a su bouleverser l’équilibre de l’Afrique centrale, déstabiliser le géant congolais, et développer son pays de douze millions d’habitants à l’influence grandissante au sein de l’UA.
Un an pour réformer l’UAAu Rwanda, la gouvernance Kagamé est celle d’un despote, pour sûr, éclairé, peut-être. Durant vingt-quatre ans, il a façonné son pays qu’il contrôle d’une main de fer, avec des méthodes autoritaires conjuguées à une approche de manageur, privilégiant la sécurité et les résultats économiques aux avancées démocratiques.
Comme par miracle, la croissance s’est envolée à 8 % pour redescendre à 6 % aujourd’hui. Et la communauté internationale retient ses critiques à l’égard de ce président soupçonné de faire assassiner ses opposants, réélu avec 98 % des voix en 2017 après avoir fait modifier la Constitution par le Parlement. Désormais, Paul Kagamé peut présider aux destinées du Rwanda jusqu’en 2034. Qu’importe, il continue d’incarner une Afrique moderne et développée, séduisante et revêche, capable de tenir tête à de vieilles puissances coloniales.
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