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Algérie – Bachir Derrais : « Pourquoi mon film sur Larbi Ben M’Hidi est censuré »

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Le film consacré à Larbi Ben M’Hidi, figure emblématique de la révolution algérienne, risque de ne pas voir le jour. Son réalisateur, Bachir Derrais, revient pour Jeune Afrique sur les raisons invoquées par les autorités algériennes.

 

Bachir Derrais a reçu, dimanche 2 septembre, un courrier de la part de la commission de visionnage du ministère des Moudjahidine. En cause, les « réserves » des autorités sur le film qu’il réalise sur le héros de la révolutionne algérienne, Larbi Ben M’Hidi.

La commission juge que dans cette biographie de celui qui fut étranglé dans la nuit du 4 mars 1957 par le général Paul Aussaresses, l’aspect politique a par trop été privilégié, au détriment de la lutte armée. Surtout, la commission semble désapprouver l’accent mis sur les dissensions internes entre chefs du Front de libération nationale (FLN).

Le réalisateur, qui dit à Jeune Afrique son dépit et sa colère, estime que ces réserves remettent en cause la sortie du film, aussi bien en Algérie qu’à l’international.

Jeune Afrique : Votre film sur le héros de la révolution algérienne Larbi Ben M’Hidi est-il interdit ? Censuré ? Bloqué ?

Bachir Derrais : Dans le courrier que cette commission m’a adressé le 2 septembre, il est clairement notifié que la version visionnée par les membres de cette commission est interdite à toute projection ou exploitation. Ce qui compromet clairement sa sortie nationale et internationale.

La commission n’a pas apprécié que le film évoque les désaccords entre les chefs historiques du FLN

Pour quels motifs votre film est-il bloqué à ce jour ?

La commission désapprouve son contenu. Elle conteste certaines scènes et me reproche de ne pas avoir mis l’accent sur la vie et le parcours de Larbi Ben M’Hidi. Elle estime que la partie consacrée à son enfance est trop courte. Elle juge que le côté politique de ce biopic prend plus de place que le volet de la lutte armée. Elle estime en outre que le film n’a pas suffisamment mis l’accent sur les scènes de guerre et sur les atrocités commises par l’armée française. Elle n’a pas non plus apprécié que le film évoque les désaccords entre les chefs historiques du Front de libération nationale (FLN), ainsi que la guerre de leadership qui avait opposé d’un côté Ahmed Ben Bella et la délégation extérieure et de l’autre Larbi Ben M’Hidi, Abane Ramdane et le CCE (Comité de coordination et d’exécution).
Elle va plus loin en me reprochant d’avoir porté atteinte aux symboles de la révolution

La commission juge sévèrement votre traitement de ces désaccords et de cette guerre de leadership.

Tout à fait. Elle va plus loin en me reprochant d’avoir porté atteinte aux symboles de la révolution, ce qui constitue un délit pénal passible de prison….. C’est totalement surréaliste. On fait le procès d’une œuvre cinématographique qui repose entièrement sur les écrits et les témoignages de ces mêmes chefs ainsi que sur les récits de témoins directs dont les livres se vendent librement en Algérie.

Y-a-t-il d’autres réserves ?

Dans le courrier qui m’a été adressé, la commission me reproche de ne pas avoir assez mis l’accent sur les tortures subies par Larbi Ben M’Hidi durant sa période de détention entre les mains des parachutistes du colonel Marcel Bigeard. Or aucun élément n’atteste que Ben M’Hidi a subi des tortures durant sa captivité. Tous les témoignages des militaires français qui ont pris part à son arrestation, à sa détention et à son exécution attestent qu’il n’a pas été soumis à la torture, contrairement à d’autres militants comme Brahim Chergui, Rabah Bitat, Louisette Ighilahriz, Henri Alleg ou encore Maurice Audin. Je ne peux tout de même pas inventer un épisode de la révolution algérienne qui n’a pas existé. Si la commission possède des documents historiques qui attestent des faits de torture sur Ben M’Hidi, je suis prêt à les consulter et en prendre compte.

Bernard HIEN

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