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Association des Étudiants Burkinabè en France (AEBF)Paris, le 29 octobre 2019
DÉCLARATION DE RENTRÉE
En cette année académique 2019-2020 déjà entamée, l’AEBF tient à féliciter les étudiant.es burkinabè et surtout ceux/celles en France qui ont réussi leur année écoulée. Elle tient particulièrement à souhaiter du courage aux nouveaux et nouvelles arrivant.es et ceux/celles qui redoublent leur année pour une raison ou une autre.
Camarades,
Cette rentrée académique s’effectue dans un contexte national très inquiétant dans tous les secteurs et toutes les couches de la société burkinabè. Toute chose qui traduit l’incapacité du pouvoir du Mouvement du Peuple pour le Progrès (MPP), pourtant issu de l’insurrection populaire d’octobre 2014 et de la résistance victorieuse contre le putsch de type fasciste de septembre 2015, à résoudre les préoccupations des masses populaires. En poursuivant les politiques néocoloniales et anti-sociales des pouvoirs réactionnaires qui se sont succédés, le pouvoir MPP et alliés a en effet conduit à l’approfondissement des crises multiples et multiformes :
• le système éducatif est anéanti par les politiques anti-éducatives parmi lesquelles la poursuite de la réforme LMD, hasardeuse et sans mesures accompagnantes, avec ses conséquences désastreuses (aggravation des retards académiques, chevauchements de semestres et d’années, bâclage de la formation…) ;
• le système sanitaire est sérieusement en agonie, avec l’insouciance affichée du pouvoir face au calvaire que vivent les populations ;
• la crise du logement a atteint une dimension jamais égalée ;
• la situation sécuritaire n’a jamais été aussi alarmante, et le pouvoir en place en profite pour réprimer différentes manifestations et entraver les libertés d’organisation et d’expression, en témoignent la répression de la marche-meeting de l’Unité d’Action Populaire le 16 septembre 2019 et « l’interdiction » de la marche contre la présence des bases militaires étrangères au Burkina Faso à l’occasion des 4e Journées anti-impérialistes.
Concernant la crise sécuritaire, une partie importante du territoire est sous le contrôle de groupes terroristes et narcotrafiquants qui sèment la terreur. Le couvre-feu et l’état d’urgence décrété dans plusieurs régions n’ont pas permis de freiner l’élan de ces groupes terroristes, puisque des soldats, mais aussi des populations civiles continuent de subir leur furie. Des voix s’élèvent pour dénoncer des exécutions sommaires et extrajudiciaires, souvent ciblées, commises par l’armée contre des populations civiles, sous le prétexte de cette lutte anti-terroriste. Des organisations de défense de droits humains comme le Mouvement Burkinabè des Droits de l’Homme et des Peuples (MBDHP) ont d’ailleurs mené à cet effet des investigations et attiré l’attention des autorités. Deux responsables de l’Organisation Démocratique de la Jeunesse burkinabè (ODJ) du Yagha ont été froidement assassinés le 31 mai 2019 alors qu’ils se rendaient à une audience avec le hautcommissaire de ladite province pour débattre de questions relatives aux rackets et à l’accès des populations aux services sociaux de base. Et depuis lors, tout est visiblement mis en œuvre pour empêcher une autopsie.
Cette situation sécuritaire n’est pas non plus sans impact sur l’éducation. En effet, le gouvernement lui-même dans son point de presse du 19 septembre 2019 fait état de 2152 écoles primaires qui ont été fermées temporairement au moins une fois pour raison d’insécurité, 296 757 élèves affectés répartis dans la région de l’Est, du Centre-Est, du Centre-Nord, du Nord, de la Boucle du Mouhoun et du Sahel.
En plus, pendant que fonctionnaires, élèves et étudiants, paysans, ouvriers et sans-emplois revendiquent quotidiennement de meilleures conditions de vie, d’étude, de travail et des emplois décents, le pouvoir quant à lui, fait la sourde oreille ou leur sert du “mouta mouta”. Au même moment, ces “anciens nouveaux dirigeants” excellent dans la grande délinquance à col blanc à travers des pillages organisés des richesses de notre pays, en témoignent le scandale du charbon fin, le bradage du chemin de fer à Bolloré, la privatisation de l’aéroport internationale de Ouagadougou et les nombreuses autres malversations mises à nu par la presse et l’ASCE/LC.
Camarades,
Avec la réforme unilatérale du gouvernement Edouard Philippe entreprise en cette rentrée 2019 (Bienvenue en France !), les étudiant.es étranger.es ont vu leurs frais d’inscription multipliés par 15. En effet, à partir de la rentrée 2019, ils/elles devront s’acquitter de 2.770 euros en licence et 3.770 euros en master et doctorat (contre précédemment 170 euros en licence, 243 euros en master et 380 euros en doctorat) sans compter la Contribution de Vie Étudiante et de Campus (CVEC) qui s’élève à 91 euros par an. Face à cette situation difficile pour les étudiant.es, les autorités burkinabè demeurent sourdes et muettes. Une situation qui pourrait pourtant avoir des répercussions sur le nombre de bourses accordées par l’État, puisque le CIOSPB n’attribue de bourses que dans les filières où les frais de scolarité n’excèdent pas 2000 euros.
En ce qui concerne le logement, les étudiant.es burkinabè en France sont abandonné.es à eux/elles-mêmes. La maison du Burkina Faso à Paris, plus connue sous le nom de cité Fessart, qui permettait de soulager un tant soit peu les étudiant.es, est refusée aux nouveaux et nouvelles boursier.es depuis 2016. Or, dans une ville comme Paris, il faut au moins 500 euros pour avoir un logement. Comment donc s’en sortir, même pour les plus chanceu.x.ses qui bénéficient de la bourse d’une valeur mensuelle de 552,48 euros (+ l’aide au logement de 76 euros mensuelle) ?
A ces difficultés s’ajoutent les retards dans le payement des bourses, toute chose qui n’est pas sans conséquence pour les boursier.es, condamné.e.s à chercher à survivre en lieu et place de leurs études et devant par ailleurs payer les différentes pénalités de leurs factures.
Après l’obtention de leurs diplômes, aucun mécanisme de valorisation n’est mis en place de la part des autorités burkinabè. Ce sont ainsi des centaines de personnes dont certain.es ont étudié grâce à l’argent du contribuable qui se résignent à rester en Europe pour travailler alors que notre pays a sans doute plus besoin de leurs compétences, au même titre que ceux ayant étudié au Burkina.
Camarades étudiant.es, tout cela se passe dans une certaine indifférence totale de l’ambassade du Burkina Faso en France dont l’attitude frise le mépris vis à vis des préoccupations existentielles des étudiant.es burkinabè en France.
Au regard de ce qui précède, l’AEBF :
• condamne le mépris des autorités burkinabè vis-à-vis des préoccupations des étudiant.es burkinabè en France ;
• invite les étudiant.es burkinabè en France à s’organiser en son sein pour la lutte pour l’amélioration de leurs conditions de vie et d’études ;
• appelle l’ensemble des associations démocratiques d’étudiant.es en France à s’unir contre
l’augmentation des frais d’inscription.
Non à l’insouciance des autorités burkinabè face aux préoccupations des étudiant.es burkinabè en France !
Pain et Liberté pour le Peuple !
Le comité Exécutif