L’entreprise Kangala va-t-elle nous faire un faux bond en prétextant le contexte sécuritaire ? 22 mois après l’attribution du marché, zéro bitume posé sur l’axe Dori-Gorom. Les travaux piétinent, et l’infrastructure tant attendue peine à pointer du nez. On se rappelle que le Conseil des ministres du 19 juin 2019, a marqué son accord pour l’attribution du marché à ‘’l’entreprise Kangala/SONAF SA, pour les travaux de construction et de bitumage de la route Dori-Gorom-Gorom (55 km), pour un montant de 8 774 255 835 F CFA TTC, avec un délai d’exécution de quinze 15 mois y compris la saison des pluies. Le financement est assuré par le Fonds spécial routier du Burkina (FSR-B)’’.
A l’heure où nous traçons ces lignes, des granulats sont étalés sur une distance de 20km (Dori-Féleol) et ce remblai ressemble enfin au seul morceau de route prêt à accueillir le bitume. Dans ce projet, l’entreprise Kangala s’est contentée de couper les quelques arbres
encore debout dans la zone, de débroussailler des pâturages, de dégrader le réseau existant au point où on ne peut même plus passer sur les ponts de Goudebo et de Féleol, de s’approprier l’ancienne voie pour la construction d’ouvrages sans songer à faire une voie de déviation ou de contournement ! Les usagers de l’axe Dori-Gorom roulent dans l’inconnu. Les braves transporteurs qui empruntent au quotidien le tronçon ont été obligés de dessiner dans le sol, une nouvelle voie tantôt parallèle à l’ancienne, tantôt perpendiculaire et en très mauvais état. Les résultats sont éloquents. Les rares automobilistes qui s’y aventurent font 2 heures de route en pleine saison sèche pour parcourir 55 km.
La situation est plus encore favorable aux accidents et aux incidents : chaussée constellée de tranchées, de crevasses, de buttes, le tout enveloppé dans un nuage de poussière, et sans aucune signalisation. Si ce tronçon présente actuellement un risque en matière de circulation, quand serait-il en hivernage ? La province de l’Oudalan court le risque d’être coupée du Burkina à la première pluie de 2021. Le tronçon Dori-Gorom est l’épine dorsale de l’économie de cette province frontalière du Mali et du Niger. Le développement de l’Oudalan est hypothéqué par le manque de routes.
Dori-Gorom est un parcours de combattant, dangereux d’abord à cause de l’état de cette route qui fait le lit de l’insécurité. Les voyageurs, le long du chemin, ont la peur au ventre, au moindre coup de frein l’inquiétude se lit sur les visages, chaque engin motorisé qu’on croise est suspect, les prières prennent la place des causeries entre passagers d’un même autobus et chaque arrivée à bon port est une grâce divine.
L’entreprisse Kangala a essuyé plusieurs attaques sur l’axe Dori-Gorom. Kangala a payé un lourd tribut aussi bien en capital humain qu’en équipements roulants. Il faut saluer le courage de Kangala. Cependant, l’insécurité peut-elle tout justifier surtout qu’après l’incident du 23 mars 2021 où des hommes armés ont touché mortellement un employé de Kangala et emporter une voiture de l’entreprise, les travaux d’excavation et de rafistolage en latérite dans la zone de Baliata à une vingtaine de km de Gorom se font sous l’œil protecteur des FDS.
L’entreprise Kangala est dirigée par son PDG Ali Konaté, par ailleurs président de l’Union nationale des Dozos (chasseurs traditionnels) du Burkina, lui qui s’était opposé à l’installation des Koglwéogos dans la Région de l’ouest. Kangala est aussi le nom d’une commune rurale du Burkina Faso dont le nom a inspiré le promoteur de l’entreprise. Kangala est située dans la province de Kénédougou et dans la région des Hauts-Bassins. Cette commune est réputée pour son festival Dozo.
Dans la revue des marchés publics, l’entreprise Kangala n’a aucune expérience en matière d’aménagement de voie bitumée. Le Conseil des ministres du 30 décembre 2017 a attribué à la même Entreprise Kangala, les travaux d’aménagement du tronçon Gorgadji, d’un linéaire de 38,53 Km, pour un montant de 1 147 411 980) F CFA TTC avec un délai d’exécution de 8 mois. Ce chantier en souffrance, reste toujours inachevé, là encore en raison de la dégradation de la situation sécuritaire. On ne saurait trouver d’excuse dans le fait que la zone soit rouge.
Ag Ibrahim
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De tous les gouvernements que j'ai connus au Burkina Faso , c'est le plus corrompu.