A l’occasion de la journée mondiale de l’environnement, l’équipe de FasoPiC.net a accordé une interview à un citoyen engagé dans la lutte pour la protection de l’environnement. Il s’agit de Fulgence YAMEOGO, coordonnateur de l’association le Baobab, dont le siège est basé à Ouagadougou. Avec lui, il est question de l’analyse sur la politique de la gestion de l’environnement au Burkina Faso.
FasoPiC : Présentez-nous votre association.
Fulgence Yaméogo : le Baobab est une association reconnue en l’an 2000. Ses domaines d’intervention se résument essentiellement sur les questions environnementales, notamment l’agroécologie et la foresterie. L’association fait beaucoup de la transformation des produits locaux. Aussi, le Baobab soutien les organisations paysannes dans la promotion de l’économie sociale et solidaire par le biais d’un accompagnement technique pour la gestion participative, la mise en réseau, et la création de coopératives. Nous intervenons également dans l’éducation à travers l’alphabétisation et la formation des jeunes, ainsi que leur réinsertion, sans oublier que notre origine est théâtrale. Ainsi, le théâtre reste la pièce maitresse de nos différentes activités pour le volet sensibilisation.
FasoPiC : quel regard critique portez-vous sur la politique de la gestion environnementale au Burkina Faso ?
Fulgence YAMEOGO : la question de l’environnement est assez cruciale pour nous au sein de l’association le Baobab, mais il semble que les autorités de tutelle ne la prennent pas à bras le corps. Au niveau national, il y a parfois des actions qui sont menées avec des contradictions. Lorsque nous prenons le volet reboisement on se demande s’il y a un sérieux suivi par rapport au taux de reprise, quand on sait que chaque année des campagnes de reboisement sont engagées dans chaque ministère. Aussi, nous critiquons le fait que certaines structures ne font pas leurs reboisements au bon moment. Nombreuses sont celles qui reboisent au mois d’août, ce qui est déplorable car à cette période nous sommes déjà au sortir de la saison pluvieuse. Une bonne campagne de reboisement doit commencer à l’entrée de la saison des pluies pour faciliter l’enracinement des plantes et un meilleur suivi. Etant donné que nous sommes dans un pays sahélien où la pluviométrie n’excède pas plus de 4 mois, il faut profiter au maximum du peu de pluie que nous avons en l’utilisant de façon rationnelle.
Fasopic : Quelle analyse faites-vous de l’utilisation des pesticides au Burkina Faso ?
Fulgence YAMEOGO : Nous avons la problématique de l’utilisation des pesticides qui n’est pas sans conséquences pour l’environnement et les populations. La plupart de ceux qui manipulent ces produits ne sont pas lettrés, donc fortement exposés parce qu’ils ne connaissent pas la dangerosité. On assiste alors à la destruction de la biodiversité et des nappes phréatiques. Il faut une politique claire pour la sauvegarde de l’environnement. A ce sujet nous proposons comme alternative le développement d’une agriculture durable à travers la pratique de l’agroécologie et l’agriculture biologique.
Fasopic : que faites-vous pour la gestion des sachets plastiques au Burkina ?
Fulgence YAMEOGO : Pour ce qui concerne les sachets plastiques nous abordons cette question à travers un combat à la base. Le Baobab organise chaque deux ans un concours dénommé le ‘’concours éducateur’’. Il s’intéresse aux plus jeunes en collaboration avec des enseignants, à travers la sensibilisation sur le péril de ces sachets. Il y a encore du travail à faire même s’il y a un pas en avant qui mérite que nous saluons les autorités.
Fasopic : le lâcher des moustiques génétiquement modifiés au Burkina fait débat. Quelle est votre position ?
Fulgence YAMEOGO : En ce qui concerne la question des moustiques génétiquement modifiés, nous nous sommes prononcés contre cette expérimentation. A cet effet, nous avons eu sous l’égide du CCAE et d’autres structures, à faire des marches de protestation contre la manipulation génétique. Il s’agit de la survie de nos populations, et les technologies pour un pays comme le nôtre ; on ne se lance pas quand on n’a pas cerné les vrais contours de la dangerosité. Mais malheureusement nous sommes toujours utilisés comme des populations cobayes pour tester des expériences. Pour moi quand on parle de journée mondiale de l’environnement, ça doit être un moment de réflexion pour nos populations, pour savoir si réellement nous avons eu une politique cohérente sur la protection de l’environnement.
Fasopic : en tant qu’acteur de protection de l’environnement, comment appréciez-vous le dossier sur la forêt de Kua ?
Fulgence YAMEOGO : pour nous qui défendons la nature, nous pensons que la forêt est le premier hôpital. L’histoire du covid19 nous l’a démontré à plusieurs titres. Ceux qui pensaient qu’il faut détruire une forêt pour protéger des vies parce que l’hôpital soigne n’ont rien compris. L’environnement soigne, même les médicaments de l’hôpital sont issus de la forêt.
FasoPiC : le Baobab rencontre-t-il des difficultés ?
Fulgence YAMEOGO : naturellement quand on développe des initiatives qui ne sont pas forcément comprises par une catégorie de la population on peut faire face à quelques difficultés. Par exemple, au niveau de la restauration des terres ce n’est pas toujours facile. La question des terres est vraiment cruciale au niveau des communautés, si bien que quand vous voulez faire un reboisement sur une grande superficie ça devient compliqué étant donné que ces terres appartiennent à des familles. A tout cela, s’ajoute le problème de la divagation des animaux et les feux de brousse. Enfin, il y’a la question des ressources financières qui fait souvent obstacle aux actions du Baobab.
Propos recueillis par MICHEL CABORE
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