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A plusieurs reprises, l’un de ces hommes gifle la première femme en lui disant « lève la calebasse qu’on te voit bien, toi, BH, tu vas mourir ». L’appellation BH au Cameroun désigne le groupe islamiste Boko Haram.
Ces images qui semblent tournées avec un téléphone portable sont commentées en direct par un homme. Il présente les protagonistes qu’il filme : des éléments Boko Haram récupérés après un assaut, dit-il. Il donne aussi des noms : notamment le caporal-chef Tsho-tsho et le 2e classe Cobra.
Les deux hommes en tenue militaire font avancer les deux femmes et leurs enfants sur une piste, les poussent vers une petite colline, bandent leurs yeux, font s’agenouiller la première femme tout comme la petite fille à qui ils mettent un t-shirt sur la tête. Puis la deuxième avec le bébé sur le dos s’agenouille, les quatre sont fusillées dans le dos. Une vingtaine de coups sont tirés, puis gros plan sur les quatre cadavres, dont le petit bébé.
Des images insoutenables et qui suscitent une très forte indignation au Cameroun. Car tant la tenue militaire que le français des protagonistes pointent vers l’armée camerounaise. Le paysage aussi ressemble à celui de l’Extrême-Nord du pays où l’armée justement se bat contre le groupe terroriste Boko Haram.
Un pas a été franchi
Pour le Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (Redhac), pas de doute, ce sont des éléments des forces de sécurité du Cameroun qui sont responsables de ces exécutions. Ils disent avoir authentifié la vidéo et recoupé les informations.
La militante Maximilienne Ngo Mbe en appelle à la justice camerounaise. « C’est inacceptable dans un Etat de droit, s’indigne-t-elle sur RFI. Des enfants de 2 ans et 5 ans environ qui subissent au grand jour des actes de tortures, des femmes qui subissent des actes de tortures et qui sont après assassinées par 17 balles dans le crâne. Même si on est en guerre contre la secte Boko Haram – une guerre qui est légitime, le terrorisme ne doit pas venir imposer sa loi au Cameroun – mais ça ne peut pas donner à ce que les forces de sécurité deviennent des bourreaux. Là, je pense que c’est un pas qui a été franchi depuis qu’on est dans cette guerre-là et il est urgent que les autorités du Cameroun prennent des mesures adéquates. Que ces éléments soient arrêtés sans conditions et dans l’immédiat et qu’ils payent conformément à la loi, qu’on ouvre des enquêtes pour mettre la main sur ces éléments de forces de défense et qu’ils soient punis. »
Les autorités authentifient la vidéo
Du côté des autorités, on se dit choqué par cette vidéo. Après avoir déclaré qu’une enquête avait été ouverte pour authentifier la vidéo, le porte-parole du gouvernement Issa Tchiroma Bakary a lu en début de soirée mercredi une déclaration pour tenter de démontrer le caractère « fake » du document.
« A l’examen de cette vidéo, les hommes concernés arborent des uniformes bariolés, pour certains, de type forêt. Alors que le paysage et le relief indiquent clairement qu’on se trouve en zone sahelo-sahélienne. En pareilles circonstances, il est constant que les tenues de combat utilisées par l’armée camerounaises sont toujours de type sahéliennes. Par ailleurs, toujours au registre de la tenue vestimentaire comme identifiant des armées, les équipements individuels des militaires camerounais engagés dans la zone sont des équipements de combat conformes aux standards obligatoires de port de casques lourds, de gilets par balles et de chaussures de type bottes rangers. Ce qui, manifestement, n’est pas le cas des personnes contenues dans la vidéo. Les armes arborées par les présumés soldats présentés dans la vidéo, ne sont pas celles utilisées par l’armée camerounaise dans cette zone d’opération. »
Ça remet au gout du jour cette question de la transparence. Il faut que le peuple soit informé de ce qui se fait. Parce que le rôle de l’armée est de protéger les populations contre l’ennemi. Or, Boko Haram est un ennemi.