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Le Covid 19 rebat les cartes. Toutes les prévisions sont à reconsidérer au Burkina Faso. De fond en comble. Face aux ravages du virus et aux réponses apportées, de nombreux Burkinabè sont gagnés par le scepticisme. Le coup est dur. C’est indéniable. Mais céder à la panique ou au désespoir accroit la vulnérabilité et rend la lutte encore plus ardue. A contrario, il faut, individuellement et collectivement se retrousser les manches pour une réponse énergique, générale et rapide face à cet ennemi qui veut nous anéantir. Le pays doit être à l’image du roseau qui plie mais ne rompt pas. En aucun cas nous ne devons capituler.
Il y a eu un avant covid 19. Il y aura nécessairement un après covid 19. Le Burkina Faso continuera sa marche radieuse. L’histoire ne s’arrêtera pas. Bien au contraire. Elle va même s’accélérer avec de profonds bouleversements. Le coronavirus vient rappeler à l’ensemble de l’humanité qu’aucun acquis n’est définitif. Tout est relatif en ce bas monde. Il faut donc le sens de la mesure et de l’humilité. Pour agir, il ne faut pas se laisser gagner par la peur, paralysante, mais avancer, avec courage et lucidité, positivement, en se fondant sur les rares certitudes que la situation actuelle nous fait découvrir, ou redécouvrir. Notre mode de vie doit radicalement changer.
Chacun doit se conformer aux règles édictées pour son propre bien et pour le bien de tous. Face à la propagation du virus qui avait infecté 246 personnes à la date du 30 mars 2020 au Burkina Faso, de nombreuses mesures ont été prises. Couvre feu, fermeture des maquis et grands marchés, fermeture des frontières terrestres, aériennes et ferroviaires, fermetures des écoles et lieux de cultes, interdiction des regroupements de plus de 50 personnes mise en quarantaine des villes touchées par le covid-19, exhortation au respect des gestes barrière… Si certains font l’effort de respecter les consignes, de nombreux burkinabè, comme s’ils vivaient sur une autre planète continuent à les fouler au pied. Conséquence, le nombre de cas croit de jour en jour faisant du Burkina Faso le pays le plus touché d’Afrique de l’Ouest loin devant la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Sénégal. C’est un bien triste record.
Appel à un sursaut patriotique
Face à l’ampleur que l’épidémie prend, les Burkinabè doivent rapidement réinventer un avenir au pays. Toutes les forces doivent s’unir dans un élan patriotique et sous le leadership du Président Roch Kaboré pour stopper la propagation du virus et permettre à la vie de reprendre son cours normal. Le moment est venu de taire les divergences pour l’intérêt supérieur de la nation. L’orage passé, les joutes pourront reprendre. Pour le moment, l’union sacrée ne se constate pas sur le terrain. Chacun (commerçant véreux, politicien opportuniste, syndicaliste cagoulé,…) tire sur la corde déjà trop raide. L’incurie collective pousse le pays de jour en jour vers le précipice. Il est temps de se ressaisir. En plus des mesures déjà prises, il faut dans l’urgence :
•Veiller au strict respect des mesures de restriction temporaire imposées en faisant appel si nécessaire aux forces de défense et de sécurité. L’inaction ou le laxisme peuvent s’avérer suicidaires. Les récalcitrants doivent être sanctionnés pour l’exemple (fortes amendes, prison,)
•Réévaluer le plan de riposte. Les 11 milliards annoncés sont insignifiants et irréalistes par rapport aux besoins réels. La crise n’est pas que sanitaire. Elle est multidimensionnelle. Il faut donc des investissements structurants dans plusieurs secteurs à la fois.
•Améliorer le dispositif de communication et de sensibilisation. Le système actuel est statique, gangréné par la cacophonie et donc peu crédible. En communication de crise, il faut beaucoup plus de flexibilité et de créativité.
•Opérationnaliser les mesures sociales. La crise du coronavirus affecte profondément l’économie des ménages. Des mesures sociales doivent rapidement être prises pour soulager la souffrance des populations et prévenir d’éventuelles émeutes. Parmi les actions à diligenter pour les couches sociales les plus vulnérables, figurent les allègements fiscaux, la prise en charge (à concurrence d’un certain montant) des factures d’eau et d’électricité, la distribution gratuite ciblée de vivres et de kits d’hygiène, le cash transfert, … Tous ces appuis sont à budgétiser et à intégrer dans le plan de riposte. De nombreuses ONG sont du reste déjà très actives dans ces domaines. Le gouvernement doit les mobiliser et les inciter à l’action.
•Renforcer la formation et l’équipement des agents de santé. Les kits de protection individuelle font cruellement défaut dans nos formations sanitaires. Cette situation expose dangereusement les agents de santé pourtant en première ligne de la lutte.
•Lancer un appel solennel à contribution populaire. Quelques opérateurs économiques se sont déjà manifestés mais la dynamique est encore timide par rapport à l’urgence et aux besoins. La maison brûle. Chaque fils et fille doit aider activement à maîtriser l’incendie. Ministres, députés, présidents d’institutions, DG de société, cadres du public ou du privé, Burkinabè de l’intérieur et de l’extérieur… la cause est commune. Chacun doit accepter délier les cordons de la bourse. Les Burkinabè seraient très fiers de voir leurs premiers responsables renoncer à certains privilèges pour contribuer à cet effort de guerre sanitaire. En ces moments particulièrement difficiles, nous devons compter sur nos propres forces car les différents pays sont durement éprouvés. Pour y arriver, il faut absolument que les contribuables aient la certitude que les fonds seront bien gérés.
•Intensifier la recherche, les essais cliniques en exploitant judicieusement les compétences de la médecine traditionnelle.
Le Burkina Faso est dans une situation particulièrement difficile puisqu’aux affres régulières du terrorisme vient s’ajouter le corona virus. Nous n’avons plus une seconde à perdre. C’est dès maintenant qu’il faut anticiper l’après crise avec des solutions viables. Nous ne pouvons pas avancer le nez dans les guidons. Comment sort-on de la crise actuelle ? Que fait-on pour relancer la machine ? Des alternatives existent. Il faut juste accepter individuellement et collectivement se sacrifier pour gagner cette bataille et se préparer à gagner les suivantes. Trêve d’atermoiements. Place à l’action !
Jérémie Yisso Bationo
Enseignant chercheur
Ouagadougou