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Les procureurs de la Cour pénale internationale (CPI) ont annoncé mercredi faire appel de l’acquittement retentissant de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, exhortant les juges à ne pas autoriser son retour en Côte d’Ivoire.
Dans un document de la Cour consulté par l’AFP, l’accusation «a déterminé son intention de faire appel de la décision» d’acquittement de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, ex-chef du mouvement des Jeunes patriotes.
MM. Gbagbo et Blé Goudé, qui étaient accusés de crimes contre l’humanité commis pendant la crise post-électorale de 2010-2011 en Côte d’Ivoire au cours de laquelle plus de 3000 personnes avaient été tuées, ont été acquittés mardi par la Cour basée à La Haye.
Cette décision a provoqué des scènes de liesse chez leurs partisans en Côte d’Ivoire mais aussi un appel des autorités à «garder de la compassion pour les victimes» et suscité des critiques de la CPI qui subit un nouveau camouflet.
La mise en liberté des deux hommes ordonnée par les juges a été suspendue dans l’attente d’une audience qui a eu lieu mercredi matin, au cours de laquelle les procureurs ont pu faire part de leurs objections.
«La Chambre ne peut pas dire exactement à quelle heure la décision sera rendue», a déclaré le juge président Cuno Tarfusser lors de cette audience. «La réponse sera rendue aujourd’hui, mais pas avant 15H00 (14H00 GMT), ça c’est sûr», a-t-il ajouté.
Pas de détails non plus à ce stade sur le temps qu’il faudrait pour libérer les deux hommes si les juges se prononcent dans ce sens. Dans des affaires similaires, il a fallu plusieurs jours à la Cour afin d’organiser la libération des suspects acquittés.
– «Risque de fuite» –
Pour les procureurs, il existe des «raisons exceptionnelles» de s’opposer à la libération inconditionnelle de M. Gbagbo. Ils évoquent notamment un «risque concret» que ce dernier ne comparaisse pas devant la CPI en cas d’un procès en appel.
«On ne peut pas dire que la procédure en appel soit un mort-né. Il se pourrait très bien qu’il y ait un nouveau procès», a affirmé le procureur Eric McDonald au cours de l’audience.
L’accusation a cependant déclaré qu’elle ne s’opposerait pas à une mise en liberté dans un pays membre de la CPI — excepté la Côte d’Ivoire — «si le risque de fuite peut être atténué en imposant une série de conditions».
Les deux équipes de défense ont également indiqué être prêtes à signer un document de la Chambre qui engage les deux accusés à comparaître à un éventuel procès en appel s’ils sont libérés.
En détention depuis plus de sept ans, Laurent Gbagbo a explosé de rire quand, à la demande du juge, une de ses avocates est venue lui demander s’il était prêt à signer un tel document.
«Bien sûr!», a répondu son avocat, Emmanuel Altit, sous les rires euphoriques de la tribune publique.
«L’accusation semble vouloir ignorer le changement sur le fond. Laurent Gbagbo n’est plus un accusé, Laurent Gbagbo a été accusé. Il n’est plus présumé innocent, il est reconnu innocent. Cela change tout», a-t-il martelé.
Premier ancien chef d’État à avoir été remis à la CPI, Laurent Gbagbo était jugé pour des crimes commis pendant la crise de 2010-2011 née de son refus de céder le pouvoir à son rival, l’actuel président ivoirien Alassane Ouattara. Les violences ont fait plus de 3.000 morts en cinq mois. Il avait finalement été arrêté en avril 2011 par les forces du président Ouattara, soutenues par l’ONU et la France, avant d’être remis à la CPI.
Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé étaient accusés de quatre chefs de crimes contre l’humanité: meurtres, viols, persécutions et autres actes inhumains, pour lesquels ils ont toujours plaidé non coupable.
Infligeant un nouveau revers aux procureurs de la Cour avec cette décision, les juges ont expliqué que «l’accusation ne s’est pas acquittée de la charge de la preuve conformément aux critères requis» par la justice internationale.
La plupart des tentatives de la Cour de juger des personnalités politiques de haut rang – presque toutes en Afrique – se sont soldées par des échecs ou des acquittements.
Source : AFP