En Thaïlande, l’arrestation la semaine dernière d’un homme d’affaires de premier plan en train de chasser des espèces protégées dans un parc forestier soulève l’indignation. L’homme, l’un des plus riches du royaume, a été libéré sous caution. Beaucoup de Thaïlandais craignent qu’il puisse peser sur la procédure judiciaire du fait de sa fortune et de son influence.
De notre correspondant en Thaïlande,
L’arrestation a eu lieu dans la nuit, au sein du parc forestier Thung Yai Naresuan, dans l’ouest de la Thaïlande. Les rangers ont découvert un campement où se trouvait l’homme d’affaires Premchai Karnasuta et trois accompagnateurs. Ils y ont aussi trouvé trois fusils automatiques et des carcasses d’espèces protégées, notamment celle d’un léopard indochinois et d’un cerf aboyeur. Au moment du raid, Premchai, qui dirige la firme de BTP Italian Thai, la plus grosse de Thaïlande, était en train de déguster une soupe faite avec la queue du léopard. Le léopard était dépecé, sans doute pour pouvoir ensuite utiliser sa peau comme décoration.
Pris en flagrant délit de corruption
L’affaire a immédiatement soulevé une vague d’indignation. D’abord parce que l’homme d’affaires a nié en bloc qu’il était en train de chasser des espèces rares, malgré l’évidence. Mais aussi parce qu’il a tenté, sans succès, de corrompre les rangers pour se tirer d’affaire. Il semble aussi que ce ne soit guère la première fois qu’il se livre à ce genre de partie de chasse, comme l’ont montré des photos publiées sur internet. Même la sœur ainée du roi de Thaïlande est intervenue en déclarant publiquement que les Thaïlandais devaient suivre attentivement l’affaire, et apporter leur soutien aux rangers qui ont procédé à l’arrestation. Le chef ranger qui a mené le raid est devenu un héros national. Il a reçu des messages de soutien de la part de dizaines de milliers de Thaïlandais.
La junte embarrassée
Généralement en Thaïlande, les hommes très riches et influents sont traités par les tribunaux de manière différente des prévenus ordinaires. Pour l’instant, les généraux au pouvoir clament haut et fort que justice doit être faite, mais beaucoup de Thaïlandais se méfient car les procédures contre des accusés proches de la junte se sont souvent enlisées.
La firme de Premchai vit presque exclusivement de gros contrats publics; elle est engagée dans plusieurs grands projets commandités par la junte. Mais même pour les généraux au pouvoir, l’affaire est délicate tant le dégoût de la population pour ce qui s’est passé est patent. Et vouloir protéger le milliardaire chasseur pourrait bien se retourner contre le régime militaire lui-même.
http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20180212-thailande-parc-thung-yai-naresuan-chasse-especes-menacees-corruption-junte
