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Loi anti-« fake news », déontologie: la régulation des médias fait débat

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Lutter contre les « fake news » nuit-il à la liberté d’informer? Faut-il créer un conseil de déontologie pour sanctionner les dérives des journalistes? La régulation des médias et des réseaux sociaux est au coeur des débats des 11e Assises du journalisme à Tours.
La ministre de la Culture, Françoise Nyssen, est intervenue jeudi aux Assises pour prendre la défense de la proposition de loi qui vise à réprimer les fausses nouvelles ou « fake news » en période d’élections, face aux critiques émanant de la sphère journalistique contre un projet de texte jugé tantôt inapplicable, tantôt potentiellement « liberticide ».
« Le droit français n’est plus adapté. Il ne permet pas d’agir assez vite, ni de façon assez systématique » contre la diffusion de fausses nouvelles via « Facebook, Youtube ou Twitter », a-t-elle plaidé, en assurant que le texte visait à « responsabiliser » ces plateformes.
Elle répondait ainsi aux critiques d’organisations comme le Syndicat national des journalistes (SNJ), premier syndicat de la profession, qui a réclamé l’abandon d’un texte « potentiellement liberticide » qui pourrait « devenir un moyen d’entraver le travail des journalistes ».
« C’est inefficace et potentiellement dangereux car on met le pas vers quelque chose qui pourrait conduire à de la censure », a affirmé lors des Assises Vincent Lanier, premier secrétaire national du syndicat, qui prône pour juguler les « fake news » le développement de l’éducation à l’information – une solution également défendue par le gouvernement -, et un renforcement des moyens des rédactions.
« On peut toujours craindre un problème de censure, et de toute façon ce sera inopérant », a abondé Jean-Bernard Schmidt, cofondateur du média numérique Spicee. Mais il reconnaît une vertu à ce texte: il « pose le débat sur la place publique de manière très visible » et pointe du doigt « la responsabilité des plateformes ».
La proposition de créer un conseil de déontologie des médias alimente également les débats à Tours, où elle a été relancée par l’Observatoire de la déontologie de l’information (ODI), un organisme qui réunit des journalistes, des entreprises de presse et des particuliers.
– Autorégulation –
Un serpent de mer, et longtemps un épouvantail pour une partie de la presse, cette idée d’un « conseil de la presse » à la française, comme il en existe déjà dans près des deux-tiers des Etats de l’Union européenne ou au Québec, semble faire son chemin.
Le chef de file des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon, qui se dit régulièrement la victime de journalistes travaillant à charge, et a tenu récemment des propos extrêmement virulents contre les médias, défend lui-même depuis des mois l’idée d’un conseil de déontologie des médias, un « tribunal professionnel » pour permettre aux citoyens de faire respecter le « droit à une information objective ». Il a lancé en décembre une pétition en ce sens qui a reçu plus de 180.000 signatures.
L’ODI défend lui l’idée d’une instance indépendante du gouvernement comme du CSA, qui n’aurait pas de « pouvoir de sanctionner » et jouerait un « rôle pédagogique », en pointant du doigt les dérives et en encourageant les bonnes pratiques.
Une forme d’autorégulation que le SNJ voit d’un bon oeil.
« Il faut qu’on avance sur ce sujet dans la profession, sinon d’autres s’en chargeront à notre place. A nous de construire dans les années qui viennent ce qui pourrait être une instance de régulation, peut-être adossée à la CCIJP (l’organisme professionnel qui délivre les cartes de presse) et que le public pourrait saisir lorsqu’il y a une erreur ou une faute déontologique », estime Vincent Lanier.
Reste surtout à convaincre, souligne l’ODI, les patrons de presse qui se sont opposés par le passé à des initiatives similaires.
Un rapport remis en 2014 au ministère de la Culture avait déjà donné du grain à moudre aux partisans d’une telle instance, défendue depuis 2006 par une association, l’APCP.
De son côté, l’ONG Reporters sans frontières, qui regarde avec « bienveillance » la proposition de l’ODI, présentera le 3 avril son projet de « système de certification des médias » européen. Un dispositif qui distinguerait les médias respectant des normes de rigueur.
Mireille Bailly

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