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Sous nos yeux impuissants, il se perpétue depuis des siècles le pillage, la surexploitation, la main-mise des ressources naturelles, des matières premières (énergétiques, minérales, agricoles) de nos pays en voie de développement avec la complicité d’une toute petite minorité d’entre nos frères et sœurs ainsi que de leurs amis et familles. Eux qui n’ont vraiment pas hontes d’être immensément « riches » au milieu de tant de pauvres au lieu de contribuer une bonne fois pour toute à améliorer le sort de leur semblable. Protéger notre souveraineté, notre patrimoine, être maître de nos propres richesses face aux industriels sans foi ni loi prêts à toutes les cruautés, c’est également protéger et savoir exploiter, transformer, exporter nous-mêmes les ressources naturelles que la Nature nous a dotées ! Les métiers liés à l’industrie des mines de A à Z ne devraient plus au XXIème siècle être un secret pour nous.
Il ne paraît certes pas évident à prendre en main, mais c’est un défi de les maîtriser en masse dans de très nombreux territoires africains au regard des gros enjeux liés à la société de l’information actuelle. Tout ne dépend que de notre bonne volonté, de notre décision de passer à l’action et de notre investissement politique là dessus, à mon sens. Quoi de plus frustrant que d’être contraints dans chaque pays d’Afrique d’assister à l’insupportable agenouillement de la main d’oeuvre africaine devant ces hommes, ces femmes, ces ingénieurs hautement qualifiés venus d’autres continents notamment du Nord. Dotés de compétences qui couvrent l’ensemble du cycle de vie des projets dans l’industrie des matières premières, eux qui rivalisent d’ingéniosité afin de mobiliser différents flux de ressources naturelles africaines.
Quatre tonnes de matières brutes rien que pour la construction par exemple d’une voiture flambant neuve de 1300 kilos en transformant en Europe, Asie ou en Amérique le coton issu du Burkina Faso en tissus de sièges de voiture de marque et en ceintures de sécurité. Mais aussi le caoutchouc de la Côte d’Ivoire en pneus, ainsi que la bauxite de la Guinée Conakry pour fabriquer l’aluminium de la carrosserie. Le bois précieux du Gabon et du Cameroun servant entre autres pour la planche de bord des voitures de luxe. Le cuir issu de nos troupeaux d’animaux pour l’accoudoir de la banquette arrière ou parfois pour les sièges des passagers. Le minerai de cuivre en provenance du Congo, du Mali, de la Mauritanie et de l’Afrique du Sud pour les circuits électriques, pour l’allumage. L’étain du Congo, du Rwanda, du Burundi intervenant dans la fabrication des miroirs des rétroviseurs et peut-être aussi des pare-brises. Les minerais de fer du Liberia, de la Sierra Leone, et de la Guinée, mélangés à du carbone pour la fabrication de l’acier des boîtes de vitesses ou des pièces mécaniques des véhicules. Les dérivés du pétrole du Nigeria comme les matières plastiques servant pour la moquette, les moulages intérieurs ou les pare-chocs. Le lithium du Mali, du Congo, du Burundi, du Mozambique et du Zimbabwe pour la fabrication des batteries électriques des prochaines voitures sans gaz d’échappement, sans odeur de carburant. Enfin bref, l’uranium du Niger pour le fonctionnement énergétique 24h sur 24, 7 jours sur 7 des usines de fabrication de véhicules…
Pour un œil non averti qui observe une voiture, il ne voit pas les roches concassées, les cailloux, les graviers, les biomasses, le sable des vastes prairies de savane, de steppe de sa région natale qui sont rentrés dans la composition du véhicule, acheté à coup de millions, qu’il est entrain de conduire fièrement. Autant de savoir-faire sur le marché des matières premières que nous devrons, nous aussi, pouvoir mobiliser pour notre puissance économique plutôt que d’être des éternels consommateurs de nos ressources naturelles transformées en produits d’importation.
Il faut changer le visage de nos pays
Changer le visage de notre pays, enrichir ses populations, ses enfants, passe aussi par la maîtrise à grande échelle des techniques et des étapes fondamentales du processus d’exploitation de gisements de matières premières. En partant par la planification du projet, des études d’avant-projet et en passant par la composition des équipes, par l’élaboration avec autant de soin du budget, des collectes d’informations stratégiques, de la préparation logistique, de caractérisation, d’estimation des ressources, de valorisation, d’exploration, d’extraction, d’exportation, de transformation, et de distribution, etc, etc. jusqu’à la fameuse « diplomatie des matières premières » dans les relations internationales et financières…
En raison probablement de la pression démographique, du progrès technologique et des besoins, d’ici un peu plus de 40 ans, selon l’OCDE notre « monde utilisera probablement deux fois plus de matières premières qu’aujourd’hui. Du sable, des métaux, du charbon, du calcaire, du bois, etc. Au total, notre consommation dévorante de matériaux pourrait monter à 167 milliards de tonnes par an, contre 90 milliards actuellement, soit 45 kilogrammes par jour et par personne« .
Une manne financière à laquelle les acteurs de l’industrie minière ne voudront pour rien au monde renoncer avec son lot de compétitions sans merci, de conflits socio-politiques et de désastres pour l’accaparement des ressources. Cependant tout laisse à croire aujourd’hui que le rapport de force est en faveur de la jeunesse africaine. Cette dernière par ces multiples connaissances acquises en cette ère de l’information, a pris conscience des erreurs commises par nos politiques et hommes d’affaires par le passé et l’on peut espérer que d’autres types d’hommes soucieux de la prospérité, du bien-être et de la sécurité du peuple puissent prendre le relais et faire de notre pays, un lieu où il fait si bon vivre.
Dian Diallo