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Recrutement de jeunes volontaires au Burkina : « Il faut le faire au plus vite », Arnaud Nikiema

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Après l’attaque du convoi de la société minière SEMAFOA à Boungou, le 6 novembre 2019, qui a fait plus de 30 morts, le Président du Faso Roch Marc Christian Kaboré a décidé du recrutement de volontaires pour la défense de la patrie. Cette décision a fait couler beaucoup d’encre et de salive tant du côté de la classe politique qu’au sein des populations. Mais elle est validée à l’unanimité par la représentation nationale. Donc, Arnaud NIKIEMA, juriste de formation, doctorant en Droit privé, Attaché de recherches et enseignant vacataire à l’Université Ouaga II a accepté accorder une interview à la rédaction de FasoPiC.net. Une interview dans laquelle il donne son avis sur cette loi qui vient d’être votée.

FasoPiC : Etes-vous au courant de l’adoption de la loi autorisant le recrutement de jeunes volontaires pour la défense de la parie ? Si oui quelle appréciation en faites-vous ?

Arnaud Nikiema : Oui ! je suis au courant de l’adoption de cette loi et j’ai même parcouru son exposé de motifs et son corpus juridique. Je pense que le contenu voulu par le Chef de l’Etat s’est matérialisé dans la loi adoptée. En clair, la loi telle qu’adoptée reflète l’esprit et la lettre de ce que demandait le Chef de l’Etat. Cependant, j’ai noté dans l’exposé de motifs que les volontaires seront dotés d’armes à feu pouvant aller jusqu’aux armes de guerre en dotation dans les forces armées nationales. A priori, il n’y a rien d’anormal mais une analyse au second degré permet de dire que pendant qu’il est refusé des armes de guerre aux policiers qui sont au front et tout au long de nos frontières, de simples volontaires civiles, eux, seront dotés de tels armements. Est-ce que cela ne va pas perturber le climat entre les différentes forces en présence ? C’est une question fondamentale. Nous attendons de voir.

FasoPiC : Quels sont selon vous les avantages liés à cette loi ?

Arnaud Nikiema : Les avantages résident dans le fait que des citoyens non militaires qui voudraient apporter physiquement leur concours à la lutte contre le terrorisme trouvent là, un canal royal. Ensuite, le fait que l’enrôlement du volontaire est, dans son principe limité dans le temps une excellente chose. Il faudrait en outre relever le fait que l’action des volontaires se fera sous la conduite de l’autorité et la couverture des FDS. Ce qui est d’ailleurs salutaire. Enfin, selon moi, le fait que les droits et les obligations des appelés se trouvent clairement identifiés est aussi un avantage.

FasoPiC : certains jugent cette stratégie très dangereuse depuis qu’elle a été annoncée. Alors, est-ce qu’il y a vraiment lieu de parler de risques ?

Arnaud Nikiema : Pour ce qui est des risques, je pense que l’adoption de cette stratégie peut exacerber les violences terroristes envers les populations civiles qui vont s’engager. Mais cela ne doit en aucun cas décourager les autorités dans la mise en œuvre de la loi en question. Il faut le faire au plus vite possible pour stopper la frayeur et le martyr que vivent les populations des zones assiégées.

FasoPiC : ne pensez-vous pas que cette loi ne devrait pas faire l’objet de médiatisation ?

Arnaud Nikiema : Sur ce coup, je pense que l’encadrement juridique aurait pu ne pas se faire avec tout le tapage médiatique qui a été fait. Mais vous savez, dans nos pays, tous les actes posés par les dirigeants doivent emporter un dividende politique. C’est certainement ce qui a guidé le matraquage médiatique qui a été fait.Je pense sincèrement qu’on aurait pu trouver un encadrement juridique plus discret tel qu’un acte réglementaire autonome, et enrôler les intéressés dans la discrétion, les installer dans la discrétion pour qu’ils produisent des effets plus probants. Mais enfin… !

FasoPiC : est-ce que les Burkinabè doivent s’attendre à une réussite totale de cette stratégie ?

Arnaud Nikiema : Sous certains cieux, les supplétifs volontaires ont connu un succès. Sous d’autres cieux, ils se sont soldés par un échec cuisant. Mais à notre niveau, je demeure optimiste en entendant la mise en œuvre concrète de ladite stratégie.

FasoPiC : quel est votre mot de fin ?

Arnaud Nikiema : J’exhorte mes compatriotes à la solidarité envers les déplacés internes et toutes les victimes directes ou indirectes qui souffrent actuellement dans leur chair.
A observer comment les villages se vident actuellement, comment les femmes et les enfants, même de bas-âge sont obligés de parcourir des dizaines de kilomètres à pieds ou à dos d’âne pour retrouver refuges dans les centres urbains, il faut avouer que c’est assez douloureux.

Interview réalisée par Nicolas Bazié

Michel Caboré

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