Indiscutablement, si au sein du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) on peut considérer que la démission de Réné Emile Kaboré est un «non-événement», il faut au contraire admettre qu’elle porte un coup dur au tout nouveau parti de Roch Marc Christian Kaboré. Et ce, d’autant plus qu’il porte sur les même griefs qu’il avait déjà portés, il y a quelques années contre les mêmes, alors qu’ils étaient aux commandes du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Comme quoi, le caméléon a beau changé de couleur, il lui sera toujours difficile de changer de démarche. Roch Marc Christian Kaboré, Simon Compaoré et Salif Diallo n’ont donc pas changé? En tout cas, Réné Emile Kaboré a été, on ne peut plus clair: «si ce» sont les mêmes errements qui se poursuivent», ce n’est pas la peine.
En effet, à la création du parti, les anciens ex-anciens barrons du CDP sont allés très vite. C’est de bonne guerre, car l’objet dans un premier temps était de fragiliser et leur ancienne formation politique, mais surtout les fondements de la République, c’est-à-dire les institutions de la République. Malheureusement, aucun de ces deux objectifs n’a pu être atteint. Le seul important objectif qu’ils ont pu atteindre, c’est celui d’avoir réussi à rassembler autour de leurs objectifs tous ceux qui attendaient, frustrés pour une raison ou une autre, sur le banc de la République, l’occasion de ressortir du bois. Si bien que «le large rassemblement» a véritablement eu lieu. Malheureusement, dans la précipitation ou dans l’euphorie, autant pour les premiers responsables du parti que les arrivants, chacun a oublié de bien marchander les retombées. Puisqu’en réalité, on était en affaires…politiques.
Dans la même dynamique de ce qui se passait au CDP, il fallait dans la première mouture qui a consacré la répartition des postes ou des responsabilités, tenir d’abord compte des «gens» de Salif Diallo, «des gens» de Simon Compaoré et des «gens» de Roch. Ensuite, tenir compte des autres. Trop d’appelés pour peu de places. Du coup, les premiers responsables se sont retrouvés «coincés» avec très peu de marge de manœuvre. Dans un tel contexte, les arrivants sont toujours les premiers perdants. C’est sans doute dans une telle situation que Réné Emile Kaboré, qui n’est certainement pas le seul s’est retrouvé. Très tôt, il a donc décidé de prendre ses distances. Chat échaudé craint l’eau froide.
Le MPP fait donc face à sa première épreuve: celle des démissions. Quelques trois mois seulement après sa création. C’est la preuve qu’en décidant de prendre tout ce qui leur tombait dans la main comme militant, Roch et ses camarades ont commis une grosse erreur. Parce que tous ceux qui arrivaient ne le faisaient pas pour leurs beaux yeux, non pas non plus pour pure fidélité à eux, ni par reconnaissance pour services rendus, mais surtout pour leurs propres intérêts. Une autre manière de revenir à la soupe. Tant que ce premier intérêt ne sera pas satisfait, il leur sera difficile de maintenir la cohésion des troupes. En tout cas pas pour longtemps. Malheureusement, les choses ne se présentant plus comme ils l’avaient prévu, ils doivent s’attendre sinon à d’autres démissions ou à un très faible engagement de ceux qui se considéreront encore comme militants à leurs côtés.
Ainsi, le MPP pourrait être victime de la myopie politique de ces premiers responsables qui ont pensé qu’il suffisait de retourner leurs vestes contre leurs anciens amis, de faire son mea-culpa et de dire tout simplement que plus rien ne sera comme avant pour que tout baigne dans l’huile. Réné Emile a sans doute vu assez tôt ce que certains attendent de voir.
Dabaoué Audrianne KANI
L’Express du Faso